La conférence sur le racisme organisée à Genève, sous l'égide de l'ONU et baptisée Durban 2 vient d'être le théâtre d'une pantalonade dont l'Occident semble être devenu spécialiste.
Au préalable, nous tenons à préciser que nous ne cautionnons en rien la politique du gouvernement iranien, ni les possibles postures électoralistes du Président Iranien. Nous avons suffisamment de probité en matière d'analyses et critiques des manœuvres dont font usage les différents acteurs politiques mondiaux de toutes obédiences philosophiques confondues, manoeuvres destinées à assurer leur maintien au pouvoir. Nous croyons bon d'ajouter que les "positionnements idéologiques" dus à la proximité d'échéances électorales ne sont jamais l'apanage des hommes politiques occidentaux ... Ce n'est pas Monsieur Sarkozy qui nous contredira.
Ceci étant dit, le discours d'Ahmadinejab est une synthèse de l'état de déliquescence dans lequel se trouve le monde contemporain. Il démontre de manière éclatante que le fossé entre le Nord et le Sud ne cesse de se creuser. D'ailleurs, au cours du discours du Président Iranien, les représentants des Occidentaux, en signe de protestation, n'ont rien trouvé de mieux que de sortir de la salle de conférence, plutôt que de se confronter aux déclarations faites à la tribune et ensuite y répondre. Cette démission ne peut être interprétée que comme une preuve de mépris vis à vis des populations de ce que l'on appelait autrefois le « tiers monde ». Cette rancoeur accumulée et son expression au travers des diatribes iraniennes semblent déstabiliser et gêner le camp de « la civilisation ».
Le lien suivant permettra de bien appréhender les événements. Un travail de traduction a été mené et autorise une prise de connaissance complète des déclarations du Président Iranien. Elles sont comparées ensuite aux versions officielles onusiennes ou relatées dans la presse.
http://www.legrandsoir.info/article8456.html
Qu’a-t-il dit d’inadmissible pour la bonne conscience européenne ? Que l’Etat juif imposé par les grandes puissances au sortir de la 2ème guerre mondiale est un Etat raciste qui n’admet que les Juifs, et encore, en premier lieu, d’abord, ceux qui viennent de l’Occident. Qu’à l’évidence, il s’agit d’une entreprise de colonisation qui n’hésite pas à commettre des crimes de guerre pour assurer son expansion et refouler le peuple palestinien dans des ghettos. Cet apartheid, ces crimes de guerre, ce racisme d’Etat ont été maintes fois dénoncés, y compris par des Israéliens. Que ce soit le leader de l’Etat iranien qui le dise, cela est intolérable pour ceux qui se veulent les bons apôtres de la paix alors même qu’ils sont les fauteurs de guerre. Que des pays comme le Venezuela, la Bolivie … contestent cette bien-pensance hégémonique et ils sont traités de populistes, de dictateurs, voire pire encore. La réalité du débat qui s’est déroulé lors de la conférence de Genève est tout autre que celle présentée par les médias : Ahmadinejab a été largement applaudi : c’est le sionisme et ses fondements racistes qui furent conspués.
Qu'Ahmadinejab soit antisémite et négationiste, on peut légitimement le penser. Que dans son discours, quoi qu'empreint de concepts religieux forts marqués, il ait stigmatisé l'ensemble des contradictions historiques et politiques dont se sont rendus coupables les Occidentaux depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, c'est une évidence. Que les représentants européens se soient sentis « gênés » et n'aient trouvé autre chose que la fuite au titre d'argumentaire de contradiction, est révélateur du « divorce consommé » entre riches et pauvres. Cela devrait être la source d'inquiétudes majeures pour nous. Que les laissés pour compte de la croissance (aujourd'hui déclinante) se manifestent et se hasardent à la critique sévère, nos délégués ne le supporteraient pas. Comme à l'accoutumée, nous nous sommes posés en censeurs, juges de ce qu'il convient de dire et de ce qui tient de l' inadmissible, Ahmadinejab, par son propos, ne doit que nous interpeller, même si certaines de ses déclarations méritent largement une discussion substantielle. Que nous assistions peut être à la naissance d'un « nouveau tiers mondisme » n'est pas à négliger et que cette éventualité soit une source d'inquiétude pour les puissants de ce monde est une possibilité. Dans tous les cas, le climat géopolitique mondial du moment est l'illustration des conséquences de nos politiques colonialistes et des conflits initiés au nom du fameux « choc des civilisations ». Nos délégués auraient dû sans doute lire le dernier livre de Jean Ziegler, « la haine de l'Occident ». Ils auraient pu ainsi mieux se préparer aux déclarations d' Ahmadinejab et esquisser un argumentaire contradictoire.
Gérard DENEUX & Hervé COUPERNOT
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